3/17/2014

Toprak sessiz nefessiz kalıyor zamanda : sözlü gelenek ve doğal, sirkadiyen, ay, yıllık çevrimleri / yazı ve uzay ve zaman arasında kırılma

How earth has fallen silent. - The author presents a characteristic thesis, based on clearly identified and described philosophical and anthropological foundation, stating that we must learn a lot from the relation civilizations based on oral traditions maintain with the environment (land, air, waters, animals, plants). This relation ceased when 'earth has fallen silent' for most human beings who still search understanding when, how and why this relation stopped ; let us imagine what would be gained if we would reestablish this bond.                                      In Bali, Nepal, in natural and cultural environments that connect one to condors, spiders, rocks, plants, one can experiment a man-nature dichotomy feeling that completely dissolves in line with the perception of a 'all' ; earth speaks. However, this feeling disappears when back to the Western world, one ceases hearing and feeling those overwhelming presences, finding oneself locked in a world of human beings disconnected from the rest of the universe.
David Abram achieves the presentation, the decoding, the understanding of the participatory nature of perception. Both following extracts reflect the quality of his work : "the real duty  of phenomenology, as conceived by E. Husserl at the end of his career, is the thorough demonstration of how each theoretical and scientific practice emerged from the forgotten earth yet nourishing our experience directly felt and lived, and has no other value and signification than when referred to this first reality.". Then about Merleau-Ponty : "Ultimately recognizing life and the demonstration of our solidarity to this physical form, is like recognizing our existence as similar to that of an animal among others on earth and thus regain and reactivate the basis of our thoughts.". David Abram shows that most oral tradition cultures have a totally different way of thinking the world around us. Time is perceived as cyclical, past and future often having the same value oral tradition stories were linked to natural, circadian, lunar, annual cycles. Furthermore, in many cases time and space were not so different. The meanings of tails and stories were inextricably bound to the places, and this anchoring was necessary to the explanation and the transmission. When human communities grew in size and complexity, writing came into being, first as ideographic symbols which were representations of the natural world (Egyptian hieroglyphs, Chinese ideograms and others). at that stage the link between the signs of writing and their images to the real world was maintained.
The author then shows how the invention of alphabetical writing announced a new human kind era during which time became a flow. Written and fixed, oral tradition stories were separated to their places and writing became a human artifact, filter between mankind and its sensitive environment. The 'Sacred Breath' remained because the lack of vowels in this first alphabetical writing required the reader to fill the gasps with personal interpretation. The adoption of alphabetical writing by the Greeks and the addition of vowels amplified this severance between men and their sensitive planet. At the time of Homer's Odyssey, the Greeks of before the writing considered that the word for soul was referring to the breath, the air that holds the universe, that gives life. From the time of Socrates the soul was imprisoned in human skulls, privatized, leaving the man separated from his earthly body.
 Martin Guillemot, « David Abram, Comment la terre s’est tue. Pour une écologie des sens  », Lectures [Online], Reviews, 2014, Online since 20 January 2014, connection on 17 March 2014. URL : http://lectures.revues.org/13295



L’auteur présente une thèse originale, basée sur un socle philosophique et anthropologique clairement identifié et décrit, et affirme que nous avons beaucoup à apprendre de la relation qu’entretiennent les civilisations de tradition orale avec leur environnement (terre, air, eaux, animaux, végétaux…). Cette relation a cessé quand « la terre s’est tue » pour la plupart des humains qui cherchent encore à comprendre quand, comment, et pourquoi cette relation a cessé ; imaginons ce que nous gagnerions à retrouver ce lien.                                               A Bali et au Népal dans des cultures et des milieux naturels qui font entrer en relation avec des condors, des araignées, des rochers ou des herbes, on peut vivre une expérience pendant laquelle son sentiment de dichotomie entre l’homme et son environnement se dissout totalement dans la perception d’un tout ; la Terre lui parle. Cependant, en rentrant en Occident, il cesse rapidement d’entendre et de sentir ces présences qui l’avaient bouleversé, se retrouvant enfermé dans un monde humain détaché du reste de l’univers.
David Abram parvient à présenter, à décrypter et rendre lumineux les concepts sur la nature participative de la perception. Les deux extraits suivants nous semblent témoigner de la qualité de ce travail de vulgarisation : « La véritable tâche de la phénoménologie, telle que E Husserl l’a conçue à la fin de sa carrière, est la démonstration méticuleuse de la manière dont chaque pratique théorique et scientifique naît du sol oublié et pourtant nourricier de notre expérience sentie et vécue de manière directe, et n’a de valeur et de signification qu’en référence à cette réalité primordiale et ouverte ». Puis, au sujet de Merleau-Ponty : « En fin de compte, reconnaître la vie du corps et affirmer notre solidarité avec cette forme physique, c’est reconnaître notre existence comme celle d’un animal parmi les autres sur terre, et ainsi retrouver et réactiver la base de nos pensées.». David Abram montre que la plupart des cultures de tradition orale considéraient le monde qui nous entoure d’une manière radicalement différente à la notre. Le temps y était considéré comme cyclique, le passé et le futur ayant souvent la même valeur, et les récits de tradition orale étaient liés aux cycles naturels circadiens, lunaires ou annuels. De plus, le temps et l’espace n’étaient pas distincts dans beaucoup de cas. Le sens des contes et des histoires était indissociablement lié aux lieux, et cet ancrage était fondamental pour l’explication et la transmission du sens. Quand les sociétés humaines ont grandi en taille et en complexité, l’écriture est apparue d’abord sous forme de symboles qui étaient une représentation du monde naturel (hiéroglyphes égyptiens, idéogrammes chinois entre autres). À ce stade, le lien entre les signes de l’écriture et leurs images dans le monde réel était en partie conservé.
L’auteur montre alors que l’invention de l’écriture alphabétique a ouvert une nouvelle période de l’humanité durant laquelle le temps est devenu un flux. Écrits et figés, les récits issus de la tradition orale se sont trouvés séparés des lieux, et l’écriture est devenue un artéfact humain, filtre entre l’homme et son environnement sensible. Le souffle du sacré restait cependant présent, car l’absence de voyelles dans cette première écriture alphabétique imposait au lecteur de combler ces vides par son interprétation personnelle. L’adoption par les Grecs de l’écriture alphabétique, et l’adjonction des voyelles remplissant ce dernier espace pour l’environnement sensible ont amplifié cette séparation entre l’homme et la planète sensitive. À l’époque d’Homère, les Grecs d’avant l’écriture considéraient que le terme « âme » se référait au souffle, l’air qui tient l’univers et lui donne vie. Au temps de Socrate, l’âme fut emprisonnée à l’intérieur du crâne des humains, privatisée, laissant l’homme séparé de son enveloppe sensuelle. 


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