1/11/2014

Tarihsel mitoloji - tarihsel değişimler - değişen mitoloji – Gengis Khan, Rashïd al-din, Tîmûr-i Lang, Saläh al-din, Farah Antūn ….

Historical Myth : secrets of identity and systems of representing a People

Over many centuries mythical figures continue to be reinterpreted, renew themselves and through this movement, models and values strengthen and evolve. Acknowledged recognition of the myth as a historiographical production is not an obstacle to historical research for it has been established somewhere in a specific historical time. Indeed, in all civilizations, the self awareness of a People, of community of believers or of a prestigious lineage calls for knowledge of stories involving founder events and figures. The history of the Islamic East is marked by great personages who are considered as models and Founding Fathers. Some of them are of Islamic origin, others have been inherited from Antiquity or the Bible. These characters have undergone a certain number of changes from the 10th century onward, basically because of the influence of the Shäh-nâma at a time when independent dynasties were proliferating and later with the breakthrough of the Turks, the Crusaders and the Mongols. The figures of Saladin and Chinggis Khan illustrate the renewal of ancient models, their extension and their successive reinterpretations. Mythical creativity seems to have been a cultural activity closely linked to political aims. The life of a conqueror such as Tamerlane has been set as a model by imitators who thus wished to justify their territorial claims. The biblical references attested to in the Quran allowed for the integration of the Turks and later of the Mongols into the history of the Creation as descendants from one of Noah's three sons. Ancient biblical events have also attributed a certain importance to the Muslims of the Volga area from the 18th century onward as well as to the various Christian and Muslim communities of the Caucasus. In fact, biblical references to this region abound such as the beaching of Noah's ark on Mount Ararat or the imprisonment of Gog and Magog behind the iron gates. According to Rashïd al-Din, all Mongols descend from tow men refugeesin Ergene Qûn and the one man helping them to get out of the mountain was Börte-Chino (tamâmat-i aqwâm-i mughül az nasl-i an du shakhs ki dar Arkina Qûn rafta budand va az in jumla ki az ânjâ bîtûn âmadand amiri mu'tabar bud muqaddam u sarward-i aqwäm, Bûrta Tchina nâm (ibid., p. 127)), the mythical ancestor of the Mongols. The model of this story is based has a turkish origin.  
A major change has taken place in the Arab world as regards the two « Saladins » : on one hand the ideal prince establishing a unified power, the champion of a just jihäd whose image was forged in the 7th/13th century, and the other the hero of great contemporary Arab causes. This evolution goes back to the last years of the previous century and he first decades of the 20th century, a period which coincides with the appearance of Saladin in modern Arabic literature by way of the new genres (theatre and romantic fiction). This particular phase of the history of the Saladin myth is explained in the article, focusing on a work which has played an important role in this mutation : the play writen in 1914 by par Farah Antūn, al-Sultän Saläh al-din wa-mamlakat Urûshalïm [Sultan Saladin and the kingdom of Jerusalem]. The text, the production and the reception of the play are analyzed to show how the mythical figure is born within a founding narrative, and how the image of the virtuous, liberating and unifying chief is constructed of the Muslim prince idealized by the ancient sources. Farah Antūn has created a mythical figure of a politico-heroic type responding to the expectations of the Arab world's collective psyche.

Le mythe historique : secret de l'identité et des systèmes de représentations d'un peuple
Au cours des siècles, les figures mythiques se perpétuent, se réinterprètent, se renouvellent et, à travers ce mouvement, les modèles et les valeurs se raffermissent ou évoluent. La place reconnue au mythe dans la production historiographique n'est pas un obstacle à l'investigation historique car celui-ci s'est bien constitué quelque part en une période historique précise. En effet, dans toutes les civilisations, la conscience de soi d'un peuple, d'une communauté de croyants ou d'un lignage prestigieux se nourrit d'histoires mettant en scène événements et figures fondatrices. L'histoire de l'Orient musulman est jalonnée de grands personnages qui servent de modèles de référence et d'ancêtres fondateurs, certains hérités de l'islam, d'autres de l'Antiquité et de la Bible. Leur figure s'est transformée en Orient musulman à partir du Xe siècle, largement sous l'influence du Shâh-nâma, quand se sont multipliées les dynasties indépendantes, puis à la suite de l'irruption des Turcs, des Croisés et des Mongols. Les exemples de Saladin et de Gengis Khan illustrent le renouvellement des modèles, leur extension et leurs réinterprétations successives. La créativité mythique apparaît comme un acte culturel, de portée éminemment politique. La carrière d'un grand conquérant comme Tamerlan a servi de modèle à ses épigones pour justifier leurs prétentions territoriales. Les références bibliques attestées dans le Coran ont permis d'intégrer les Turcs, puis les Mongols, dans l'histoire de la Création, comme descendants de l'un des trois fils de Noé. Des rattachements bibliques anciens ont valorisé les musulmans des régions de la Volga à partir du XVIIIe siècle, ainsi que les différents peuples chrétiens et musulmans du Caucase, région riche en références bibliques comme l'échouage de l'arche de Noé sur le mont Ararat et l'enfermement des peuples de Gog et Magog derrière des portes de fer. !!!Selon Rashïd al-din, tous les Mongols descendent de deux hommes qui s'étaient réfugiés à Ergene Qûn et celui qui les a fait sortir de la montagne n'était autre que Börte-Chino (tamâmat-i aqwâm-i mughül az nasl-i an du shakhs ki dar Arkina Qûn rafta budand va az in jumla ki az ânjâ bîtûn âmadand amiri mu'tabar bud muqaddam u sarward-i aqwäm, Bûrta Tchina nâm (ibid., p. 127)), c'est-à-dire l'ancêtre mythique des Mongols. Le modèle sur lequel est calqué ce récit est d'origine turque.         Une mutation importante s'est opérée dans le monde arabe entre les deux « Saladin », d'un côté le prince idéal imposant un pouvoir unitaire, l'homme du juste jihäd dont l'image s'est forgée au VII/XIIIe siècle et de l'autre côté le héros des grandes causes arabes contemporaines ; l'évolution remonte aux dernières années du siècle dernier et aux premières décennies du XXe siècle, période qui coïncide avec l'entrée de Saladin dans la littérature arabe moderne par le truchement des genres nouveaux (théâtre et fiction romanesque). C'est cette phase toute particulière de l'histoire du mythe de Saladin qu'éclaire l'article, centré sur une œuvre qui a joué un rôle important dans cette mutation : la pièce de théâtre composée en 1914 par Farah Antūn, al-Sultän Saläh al-din wa-mamlakat Urüshalim [Le Sultan Saladin et le royaume de Jérusalem]. Écriture, création et réception de la pièce sont analysées pour montrer comment naît la figure mythique autour d'un récit fondateur, et comment se construit l'image du chef vertueux, libérateur et unificateur : du prince musulman idéalisé par les sources anciennes, Farah Antūn a fait une figure mythique de type politico-héroïque proposée aux attentes du psychisme collectif du monde arabe. Articles de Denise Aigle et Luc-Willy Deheuvels.

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